Un portrait de Napoléon, Empereur des Français, Roi d’Italie

Napoléon, Empereur des Français, roi d’Italie, musée Wellington, 04/068/a

La collection du musée Wellington est réputée pour ses nombreuses œuvres iconographiques composées principalement de gravures qui étaient un moyen de diffusion économique et massif au XIXème siècle.

L’une de nos gravures fut acquise en 2004 à la suite de son achat dans une collection privée. Elle porte le numéro d’inventaire 04/068/a et représente « Napoléon Empereur des Français, Roi d’Italie ».

L’Empereur est ici représenté dans un médaillon portant son costume du sacre, la tête laurée à la manière des Césars romains. Ce médaillon est entouré d’attributs antiquisants qui renvoient directement au style Empire fortement influencé par les formes gréco-romaines dans des agencements martiaux. Ce portrait surmonte une vue du champ de bataille d’Austerlitz, grande victoire de l’Empereur Napoléon contre le Tsar de Russie et l’Empereur d’Autriche.

Ces deux vues, le sacre du 02 décembre 1804 et la bataille d’Austerlitz du 02 décembre 1805 devaient légitimer le pouvoir napoléonien. En effet, en une composition, la France napoléonienne est ainsi fixée aux yeux du spectateur et particulièrement son Empereur qui refonde la société tout en se posant comme le vainqueur des ennemis de l’état. Image classique de l’idéalisation d’un souverain que l’on retrouve depuis que les sociétés organisées existent comme en témoigne les murs du temple égyptien de Karnak !

Ce portrait assez célèbre fut reproduit à des milliers d’exemplaires jusqu’au début du XXème siècle notamment comme carte postale.

La réalisation d’une gravure demande la collaboration de plusieurs artistes et artisans. La nôtre a nécessite l’intervention de 4 personnes.

Jean Duplessis-Bertaux (1750-1818) est le graveur de cette œuvre qui a permit la reproduction des originaux sur gravure.

Pierre Audouin (1768-1822) est une personnalité intéressante car c’est lui qui rattache l’œuvre à Letizia Bonaparte (1750-1836) car il portait le titre de « Graveur de Mme Mère ». En outre, il participe à la réalisation du catalogue du Sacre gravant les œuvres d’Isabey. Cette connaissance des atours de l’Empereur a du grandement servir dans la réalisation de notre œuvre. Enfin, il est connu pour avoir réalisé une gravure de Wellington pendant la Restauration.
La comparaison des portraits de Napoléon et de Wellington permet de rapprocher le portrait en médaillon de notre gravure à la main d’Audouin.

Carte postale appartenant à la Fondation Napoléon
Pierre Audouin, Le feld-Marechal duc de Wellington, collection privée

Charles de Chatillon (1777-1844) est à l’origine de la mode des portraits à l’imitation du camée antique. Il utilisait les formes vues dans les trésors archéologiques du sud de l’Italie et glorifiait les arts de l’Antiquité. Sa peinture en trompe l’œil imitant les gravures sur pierre dure comme la cornaline, l’agate ou la sardoine demandait une grande virtuosité qui se retrouve dans les attributs antiquisants de l’œuvre de notre collection.
Charles de Chatillon devint le secrétaire de Lucien Bonaparte sous le Consulat. La duchesse d’Abrantès parle dans ses Mémoires :

Du comte de Chatillon, un de ses amis, que les malheurs de la Révolution avaient jeté dans la carrière des arts, qui s’en était fort glorieusement tiré et que l’exil de Lucien n’avait pas arrêté pour le suivre en Italie. Il habitait avec lui et dirigeait l’administration des beaux-arts de son intérieur

La dédicace à Letizia Bonaparte, mère de l’Empereur Napoléon est intéressante dans un contexte de médiation muséale. Cette œuvre remet en lumière l’importance de cette femme trop souvent oubliée par les commentateurs de l’histoire napoléonienne. En outre, cette gravure nous permet de poursuivre nos efforts en vue d’une revalorisation de l’histoire féminine.

Outre son rôle de mère qu’elle assume courageusement malgré l’adversité résultant des difficultés politiques que rencontre sa famille. Laetitia était une personnalité haute en couleur connue pour son expression « Pourvu que ça dure ! » quand elle parlait de la réussite de son fils. Économe, contre la volonté de Napoléon qui lui attribuait un budget d’un million de francs par an (un ouvrier qualifié en gagnait 3 par jour à Paris). Elle sera un soutien moral et financier pour toute la famille Bonaparte après Waterloo.
Refugiée à Rome et tombée dans une crise de mysticisme, elle souhaite rejoindre son fils à Sainte-Hélène ce qui lui est refusé puis tente de le faire libérer par l’intermédiaire du Pape.

Letizia s’éteint le 2 février 1836 à Rome.

Quentin Debbaudt, Responsable des collections

Edmé Bovinet « scène de bataille », musée d’art et d’histoire de Genève, E2019-0145

Bibliographie

Carolis (de) P, Letizia R. Bonaparte, Paris, Pocket, 2015.

Catalogue de vente du 11 juin 2022 (Maxime Charron), Paris, Millon, 2022

 Junot Abrantès L, (duchesse d’), Mémoires, tome VII, Paris, Librairie Ch. Delagrave, 1893.

 

Sources internet

https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/iconographie/carte-postale-ancienne-napoleon-bonaparte-bataille-dausterlitz/ (consulté le 23 juillet 2022).

https://www.napoleon.org/histoire-des-2-empires/biographies/bonaparte-letizia-1749-1836-mere-de-napoleon-ier/ (consulté le 23 juillet 2022).

https://collections.geneve.ch/mah/oeuvre/scene-de-bataille/e-2019-0145 (consulté le 23 juillet 2022).